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Affaire Damien Abad: ce que l'on sait des accusations de viol visant le ministre

Deux femmes accusent de viol le tout nouveau ministre des Solidarités. Un signalement a été transmis vendredi dernier au parquet de Paris.

Samedi, un jour seulement après la nomination de Damien Abad comme ministre des Solidarités, Mediapart a révélé que l'ancien chef de file des Républicains à l'Assemblée nationale était accusé par deux femmes de viol.

Les deux victimes présumées ont fait un signalement auprès de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, crée en février dernier par les initiatrices de #MeTooPolitique, comme Alice Coffin ou Mathilde Viot. Le signalement a ensuite été envoyé à LaREM et aux Républicains, jeudi dernier, avant d'être transmis au parquet de Paris le lendemain.

Alors que Damien Abad "conteste avec force" ces accusations et que sa présence ou non au conseil des ministres ce lundi sera scrutée avec attention, BFMTV.com vous résume ce que l'on sait de cette affaire.

Chloé: "Un black-out jusqu'au lendemain matin"

Chloé, aujourd'hui quadragénaire, rencontre Damien Abad le 7 août 2010 à un mariage d'amis, dans le Nord de la France. Elle le trouve "sympathique", mais "un peu insistant, galant-lourd, à faire un peu trop de compliments". Celui qui est alors eurodéputé centriste la sollicite ensuite par le biais de messages sur Facebook.

Après avoir refusé à plusieurs reprises de prendre un verre avec lui, Chloé voit finalement l'homme politique à l'automne 2010 à Paris. Ils vont au restaurant, puis dans un bar du IXe arrondissement de la capitale. Le député propose du champagne. Chloé ne boit qu'une coupe.

Puis, c'est "un black-out jusqu'au lendemain matin", témoigne-t-elle dans Mediapart, précisant que cela ne lui "était jamais arrivé, surtout pas après un seul verre". A son réveil, elle est en "sous-vêtements", "dans un chambre d'hôtel proche du bar". Elle a le sentiment d'avoir été "droguée".

Margaux: une relation sexuelle faite "d'irrespect, d'injonction et d'insistance"

Lorsque Margaux rencontre en 2009 Damien Abad à une réunion politique, elle a 22 ans. L'une est vice-présidente des Jeunes démocrates, l'autre, président des jeunes du Nouveau Centre. Par la suite, en avril 2010, il aurait "commencé à la draguer par SMS". De son côté, Margaux a "envie qu'il [la] remarque". Le jeune homme se montre "très insistant" pour qu'ils se voient. Elle refuse à plusieurs reprises, avant finalement d'accepter. Un récit qui n'est pas sans rappeler celui de Chloé. Et ce n'est pas la seule similitude.

Chloé et Damien Abad se voient donc une seconde fois le 12 janvier 2011 à Paris. La première précise au second qu'elle boit peu. Mais il aurait insisté, l'incitant alors à finir avec lui toute une bouteille de champagne. Chloé décrit ensuite une relation sexuelle faite "d'irrespect, d'injonction et d'insistance".

Le député lui aurait ainsi imposé une pénétration anale, malgré plusieurs refus. L'élu aurait également réclamé une fellation, puis une éjaculation sur son corps. Ce que l'intéressée a dans un premier temps refusé, avant d'accepter face à son insistance.

Contrairement à Chloé, Margaux dépose plainte, après une première tentative qu'elle n'a pas menée à son terme. En effet, le 20 février 2012, elle livre son témoignage à une policière dans un commissariat du XVIe arrondissement de Paris. Mais lorsqu'elle est rappelée, elle ne répond plus. L'affaire est classée sans suite "du fait de la carence de la plaignante", comme l'indique le parquet de Paris à BFMTV.

5 ans plus tard, le 7 mars 2017, Margaux dépose une plainte pour la seconde fois. Damien Abad est alors porte-parole de François Fillon, lui-même candidat des Républicains pour la présidentielle.

Lors de son audition, elle raconte que Damien Abad était "quelqu'un qu'elle aimait bien", mais surtout "un supérieur hiérarchique politique". D'autant plus qu'à cette époque il était l'"une [de ses] pistes les plus sérieuses", pour obtenir le poste d'assistante parlementaire qu'elle convoitait.

La plainte sera ensuite classée sans suite, le parquet de Paris jugeant l'infraction insuffisamment caractérisée.

Damien Abad se défend en mettant en avant son handicap

Face à ces accusations, l'actuel ministre s'est défendu à deux reprises. D'abord, dans Mediapart. Concernant Chloé, il affirme notamment qu'il n'a "évidemment jamais drogué personne" et qu'il est "dans l'incapacité de porter une personne, de la transporter et de la déshabiller", en raison de son handicap. Damien Abad est atteint d'une arthrogrypose, une maladie congénitale qui limite la mobilité de ses quatre membres.

Au sujet de Margaux, il évoque une relation sexuelle "consentie", dont elle aurait été à l'initiative. Selon lui, il n'y a eu "ni violence, ni agressivité, ni une quelconque contrainte morale". Damien Abad conteste ainsi toute pénétration anale, insistant sur le fait que cela n'aurait pu se produire du fait de son handicap.

Dans un communiqué transmis à l'AFP ce dimanche, il répète qu'il "conteste avec la plus grande force", les "accusations de violences sexuelles", dont il fait l'objet. Il refuse également "tout abus de pouvoir lié aux fonctions [qu'il a] occupées".

Que savaient LaREM et LR?

Mais alors que savaient les partis concernant ces témoignages, et notamment le signalement qui leur a été transmis jeudi dernier? Christophe Castaner, patron des députés de LaREM, affirme n'avoir "rien reçu". Il a néanmoins, après les questions de Mediapart, prévenu le procureur et conseillé à la victime de "porter immédiatement plainte". Toujours du côté de LaREM, Stanislas Guerini, délégué général du parti et nommé ministre de la Fonction publique depuis vendredi, assure qu'il n'avait pas relevé sa boîte mail, avant que le média d'investigations ne le contacte samedi matin.

Aurélien Pradié, secrétaire général du parti, explique quant à lui qu'il n'avait pas consulté la boîte mail sur laquelle le signalement lui a été adressé. Il affirme cependant avoir "coincé" le député dans les couloirs du Palais Bourbon en novembre 2020 pour lui reprocher "des comportements inappropriés qu'il aurait eus avec des collaboratrices". Selon Aurélien Pradié, Damien Abad aurait alors répondu qu'il "en avait marre d'entendre parler de cela".

Pour cause, en mars 2017, l'équipe de campagne de François Fillon, alors candidat à la présidentielle, aurait été mise au courant. Damien Abad officiait alors comme porte-parole de l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy. Deux semaines après le dépôt de la plainte de Margaux, l'affaire avait fuité dans le magazine Closer. Margaux avait, selon les informations de Mediapart, prévenu Anne Méaux, la communicante de François Fillon.

Le parquet de Paris a confirmé à BFMTV qu'il avait reçu vendredi un signalement de la part de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, expliquant que celui-ci est "en cours d'analyse". Il confirme également que Margaux a déposé plainte par deux fois en 2012, puis en 2017, et que ces procédures ont été classées sans suite.

Article original publié sur BFMTV.com

VIDÉO - Damien Abad accusé de viols par deux femmes, retour sur les faits présumés