Coronavirus : comment l'Italie échappe-t-elle à la reprise ?

L'Italie parvient, pour le moment, à éviter une reprise de l'épidémie de coronavirus. Mais, malgré des mesures strictes, le danger pourrait venir de l'extérieur.
L'Italie parvient, pour le moment, à éviter une reprise de l'épidémie de coronavirus. Mais, malgré des mesures strictes, le danger pourrait venir de l'extérieur.

Contrairement au reste de l’Europe, l’Italie parvient - pour le moment - à éviter une reprise de l’épidémie de coronavirus. Les mesures sanitaires strictes, prises très tôt, ont été encore renforcées ces derniers temps.

Contrairement à ses voisins européens, chez qui les courbes du coronavirus repartent à la hausse, l’Italie parvient pour l’instant à échapper à une reprise de l’épidémie. Alors que l’Espagne connaît entre 3 000 et 4 000 nouvelles contaminations quotidiennes, que la France voit plusieurs indicateurs repartirent à la hausse et que l’Allemagne a repassé la barre des 1 000 nouveaux cas par jour, la Botte maintient le cap.

Selon les chiffres rapportés par le Corriere della Sera le 12 août, 481 nouveaux cas ont été détectés en une journée dans le pays. Une situation encourageante, qui faisait dire au ministre de la Santé, Roberto Speranza, le 6 août dernier devant le Sénat : “Nous sommes sortis de la tempête [...] mais nous ne sommes pas encore dans un port sûr !”.

L’état d’urgence prolongé

L’Italie partait pourtant de loin. Premier pays touché par l’épidémie en Europe, il a aussi été l’un des plus meurtris, avec à ce jour, plus de 35 200 morts des suites du Covid-19. C’est peut-être le traumatisme de cette sombre période qui permet à l’Italie de maintenir désormais la tête hors de l’eau. C’est aussi, sans nul doute, grâce à des mesures très strictes, mises en place très tôt, et dont certaines ont même été renforcées ces derniers jours.

Bien avant la France, l’Italie avait fait le choix, le 31 janvier dernier, de déclarer l’état d’urgence pour six mois. Mesure qui renforce le pouvoir de l’exécutif et permet notamment au chef du gouvernement de contourner le Parlement, facilite certaines procédures administratives et offre la possibilité de débloquer des moyens supplémentaires pour le secteur de la santé.

Le 29 juillet dernier, Giuseppe Conte a demandé à le prolonger jusqu’au 15 octobre. “Le virus continue d'évoluer et n'a pas achevé sa course. Il serait incongru de suspendre abruptement une mesure aussi efficace”, a-t-il expliqué devant le Sénat, qui lui a donné son approbation, comme le rapporte Ouest France.

Des sanctions sévères

Les mesures sanitaires - pour la plupart semblables à celles de la France, avec port du masque en lieux clos et la distance d’un mètre à respecter - s’accompagnent, en Italie, de sanctions plutôt rédhibitoires. Le non-respect des gestes barrières peut être sanctionné de 400 euros et la Campanie (région du sud) a même décidé, fin juillet, de punir ceux qui n’auraient pas de masques en lieux clos d’une amende de 1 000 euros. Si les contrevenants sont des employés ou des commerçants, ils peuvent même voir leur établissement fermer pour quelques jours. Les Pouilles ont, quant à elles, choisi de rendre le masque obligatoire en extérieur lorsque la distance ne peut pas être respectée.

Pour faciliter la mise en place de ces mesures, le prix des masques a été encadré très tôt. Dès le 4 avril, une ordonnance a instauré que les masques chirurgicaux seraient vendus à 50 centimes l’unité. Et les habitants du pays semblent s’être très vite et massivement habitués à cette protection.

Le port du masque généralisé

Selon une étude menée par YouGov et l'Institute of Global Health Innovation (IGHI) de l'Imperial College de Londres, dès le 11 mars, 30% de la population italienne portait un masque, alors que ce chiffre n’était que de 5% en Espagne ou en France et proche de 0% au Royaume-Uni et en Allemagne.

Le chiffre a ensuite rapidement grimpé dans ce pays très durement touché. Le 19 mars, plus de la moitié des Italiens (60%) portaient un masque, contre 25% en Espagne et 10% en France à la même date. Le 23 avril, 89% des habitants de la Botte sortaient de chez eux avec un masque, un chiffre qu’aucun autre pays n’a atteint. Par comparaison, le chiffre le plus élevé en Espagne est de 87%, le 12 juin ; en France, il est de 79%, le 27 mai ; l’Allemagne plafonnait à 65% au début du mois de juillet ; au Royaume-Uni, jamais plus de 36% de la population n’a déclaré porter un masque.

Comme le montre cette étude, rapportée par Euronews, la particularité de l’Italie, c’est que l’habitude de porter un masque est restée très élevée. La part de la population déclarant en utiliser n’est jamais redescendue sous les 80% depuis que cette barre a été franchie le 9 avril.

Dépistage massif et précoce

L’autre victoire de nos voisins transalpins sur le coronavirus se situe dans sa sortie du confinement. Le pays a choisi de se lancer dans une “réouverture et une relance de l’activité très prudentes par rapport au reste de l’Europe”, quitte à garder ses écoles totalement fermées jusqu’au mois de septembre, a commenté Massimo Andreoni, chef du service des maladies infectieuses d’un hôpital romain, auprès de La Dépêche.

En parallèle, l’Italie a très tôt misé sur le dépistage. “Dès le mois de février, nous avons déployé tout un réseau de laboratoires équipés en tests PCR, à la fois au niveau régional et national”, a expliqué Flavia Riccardo, épidémiologiste à Rome à L’Institut Supérieur de Santé (ISS), dans Ouest France. La comparaison avec la France est très parlante. L’écart a commencé à se creuser dès le début du mois de mars. Dans l’Hexagone, 44 tests pour 100 000 habitants étaient réalisés en une semaine, contre 123 pour 100 000 dans la Botte.

Le fossé n’a ensuite fait que se renforcer. Entre le 4 et le 10 avril, la France a organisé 179,6 dépistages pour 100 000 habitants, alors que l’Italie en faisait 682,8 à la même période. Après des semaines à la traine, la France a fini par rattraper, puis dépasser, l’Italie sur le nombre de tests réalisés par habitant durant la première semaine de juillet. Mais l’Italie continue de mettre le dépistage au coeur de sa stratégie. Du 27 juillet au 2 août, 590 tests pour 100 000 habitants étaient effectués.

La peur de l’extérieur

Si le pays semble donc bien maîtriser sa lutte contre l’épidémie, le danger provient maintenant de l’extérieur, puisque le reste de l’Europe s’en sort moins bien que l’Italie. Pour éviter une reprise, des mesures strictes ont également été mises en place de ce côté-là. Alors qu’une quatorzaine était déjà imposée aux voyageurs en provenance de pays hors de l’Union européenne, ainsi qu’à ceux venant de la Roumanie et la Bulgarie, d’autres mesures ont été décidées le 12 août, rapporte le Corriere della Sera. Les voyageurs qui sont passés par la Croatie, la Grèce, Malte ou l’Espagne dans les 14 derniers jours ont l’obligation de présenter un test négatif datant de moins de 72 heures ou de se faire dépister dans les 48 heures suivant leur arrivée en Italie.

Certaines régions ont même encore durci le ton. La Campanie impose une quarantaine à tous ceux qui proviennent d’un de ces quatre pays - tant qu’ils n’ont pas fourni un test négatif. Dans les Pouilles, quiconque a été en contact étroit avec une personne ayant le Covid-19 doit s’isoler pendant 14 jours, même s’il est testé négativement.

Quant aux voyages en provenance du Kosovo, de la Serbie, du Montenegro, de Bosnie, de Macédoine du Nord et de Moldavie, ils n’ont tout simplement pas le droit d’entrer sur le territoire italien.

Malgré toutes ces précautions, les derniers chiffres du pays montrent une “augmentation nette des nouveaux cas”, comme le rapporte le Corriere della Sera, ainsi qu’une hausse des admissions en réanimation sur la semaine du 4 au 11 août. Une première depuis début avril, précise le quotidien.

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