Faut-il craindre la tique à pattes rayées ?
La tique à pattes rayées étend ses territoires en France depuis quelques années, encouragée par des étés de plus en plus chauds. Mais elle présente un risque pour l’homme : dans certains cas, elle peut transmettre un virus potentiellement mortel.
Son nom ne vous dit peut-être rien, et pourtant elle commence à faire parler d’elle en France : la tique à pattes rayées, ou Hyalomma marginatum de son nom scientifique. Le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) a publié une mise en garde à son sujet le 19 juin.
Aperçue dès 2007
Cet animal, de la famille des arachnides acariens, est en fait arrivé en France il y a plusieurs années. S’il “est impossible de donner avec précision la date de son implantation”, quelques-unes de ces tiques ont été aperçues entre 2007 et 2010 en Camargue, nous explique Frédéric Stachurski, vétérinaire acarologue au Cirad. En 2012 et 2013, des oiseaux migrateurs capturés au filet ont permis de constater qu’ils pouvaient introduire des nymphes de cette espèce en provenance d'Espagne ou d'Afrique du Nord”, poursuit le spécialiste.
Lui-même s’est retrouvé nez à nez avec l’une de ces tiques en mai 2014, à quelques kilomètres de Montpellier. “En 2015, nous en avons vu quelques dizaines dans deux élevages à l'ouest de la Camargue, et il était alors clair [que l’espèce] était installée en France”, nous précise Frédéric Stachurski. L’année suivante, le vétérinaire et ses collègues en croisent “des centaines” au nord de la préfecture de l’Hérault.
Désormais, l’Hyalomma marginatum est présente dans nombreuses zones, “sur le littoral méditerranéen, entre les frontières espagnole et italienne, et aussi un peu plus au nord, en Ardèche à l'ouest de la vallée du Rhône”, décrit le spécialiste.
#Tique à pattes rayées, quels dangers ? Le #Cirad étudie cette tique présente sur le littoral méditerranéen. Elle n’est pas vectrice de la bactérie responsable de la maladie de Lyme. Mais elle peut transmettre la #fièvre hémorragique de Crimée-Congo.
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Plusieurs hypothèses sur sa venue
Leur arrivée dans l’Hexagone peut s’expliquer de plusieurs façons. Via les oiseaux migrateurs, d’abord. Ils “introduisent régulièrement des nymphes de cette espèce, qui se transforment sur place en adultes. Elles ont pu finir (peut-être du fait du changement climatique en cours) par réussir à s'implanter et à créer une population pérenne”, avance Frédéric Stachurski.
Autre hypothèse : les échanges de bovins et chevaux avec l’Espagne - où la tique à pattes rayées est implantée depuis longtemps - mais aussi l’importation de lièvres et de lapins espagnols par les chasseurs français. Des sangliers infestés de tiques peuvent également avoir franchi la frontière entre les deux pays et avoir rapporté ainsi le parasite, “notamment dans la région de Perpignan”, estime le spécialiste.
On ne sait, pour l’heure, rien sur sa vitesse de propagation, mais il est tout de même possible de comprendre comment elle peut coloniser de nouvelles zones. “Un cheval infesté par Hyalomma et transporté par van à 500 km, dans un lieu où le climat et la végétation sont favorables à la tique, lui permettra de s'installer immédiatement dans une nouvelle zone”, illustre le vétérinaire. Là où elle est déjà installée, “elle va pouvoir se répandre en tâche d'huile grâce aux déplacements de la faune sauvage et des chevaux, vaches, moutons entre différents champs ou pâturages”, poursuit-il.
Dérèglement climatique,⬇️de #biodiversité, domestication, urbanisation … Ces facteurs ont déclenché des changements globaux qui ont accéléré l’émergence d’#épidémies. Quels sont les enseignements à tirer?
Avec la participation de @Francois_Roger #Cirad
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“Elle vous repère à votre respiration”
Ce parasite se fixe essentiellement sur les animaux, mais il peut arriver qu’il s’installe sur des humains. Vous ne courrez aucun risque en marchant, puisque la tique se déplace relativement lentement. En revanche, rester immobile entre 20 secondes et une minute peut offrir à une tique à pattes rayées le temps nécessaire pour vous rejoindre, si elle était présente dans la végétation alentours. “Elle vous repère par les vibrations dans le sol quand vous marchez et à votre respiration”, nous détaille le vétérinaire.
L’Hyalomma marginatum “n’est pas dangereuse en elle-même”, précise le Cirad, elle peut causer des irritations à cause de sa piqure. Le risque réside dans un agent pathogène qu’elle peut héberger et “occasionnellement” transmettre : le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo (CCHFV). “Toutes les tiques ne sont pas porteuses de ces agents infectieux et toutes les piqûres ne sont pas infectantes”, nuance le Centre de recherches.
Favorisée par le réchauffement climatique ?
Selon l’OMS, ce virus a un taux de létalité d’environ 30% - pouvant même aller jusqu’à 40%. Il peut causer de nombreux symptômes, comme de la fièvre, des douleurs musculaires, des maux de tête, de la tachycardie, des sautes d’humeur et un état de somnolence. Dans les cas les plus graves, la fièvre hémorragique de Crimée-Congo peut conduire à une insuffisance hépatique ou pulmonaire et une dégradation de la fonction rénale.
#Fièvre Hémorragique de #Crimée-Congo : les membres du comité de prévention et gestion des épidémies de la région de Mopti, informés et sensibilisés sur les mesures préventives en présence du Ministre de la Santé et des Médecins d’appui de l’#OMS. pic.twitter.com/YTn4IMNtse
— OMS WHO Mali (@omsmali) February 12, 2020
Le virus n’a, pour l’heure, jamais été détecté en France, mais des “sérologies positives” ont récemment été “signalées sur des bovins en Corse”, précise le Cirad. La fièvre hémorragique de Crimée-Congo est présente en Afrique, au Moyen-Orient, en Crimée et dans les Balkans. En Espagne, elle a fait deux morts depuis 2016, précise Midi Libre.
Les changements climatiques risquent d’offrir à la tique à pattes rayées un plus grand terrain de colonisation en France. “Comme c'est une tique qui aime le climat chaud et les étés méditerranéens” - qui pourraient bien s’étendre de plus en plus vers le nord selon les prévisions météorologiques - “ il y a de forts risques que Hyalomma puisse s'implanter à l'avenir dans de nouvelles zones où le climat lui sera devenu favorable”, met en garde Frédéric Stachurski. Il faudra donc s’habituer à vivre avec cette tique sur le territoire.
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