Guerre en Ukraine: une "cinquantaine" d'espions français de la DGSE opère sur le terrain

Guerre en Ukraine: une "cinquantaine" d'espions français de la DGSE opère sur le terrain

Une cinquantaine d'espions français exercent actuellement en Ukraine, où ils partagent connaissances et savoir-faire avec les soldats locaux, accumulant les renseignements. L'information est venue du grand reporter et journaliste Georges Malbrunot citant une "source au sein du renseignement" français.

Après avoir d'abord publié sa révélation mardi sur Twitter, il l'a confirmée mercredi soir auprès de BFMTV. Il en a profité pour lister les tâches dont s'acquittent les agents français:

"Je parle d’une cinquantaine de personnes du service action de la DGSE qui font du renseignement, qui ont pu faire au début de la protection de responsables ukrainiens, de la formation auprès des Ukrainiens auxquels on a confié du matériel sensible, peut-être aussi du partage de renseignements satellitaires."

Les tâches des agents français décryptées

Une formation dans l'utilisation d'un équipement sensible qui renvoie notamment à l'enseignement de la manipulation des canons Caesar que la France a transmis à son allié. Quant au partage de renseignements satellitaires, il consiste à aider les Ukrainiens à interpréter les photos prises par les satellites français pour repérer les positions russes et comprendre leurs mouvements à venir.

Un service action... et des interrogations

Le 4 juillet dernier dans les colonnes de Var Matin, Alain Juillet ex-patron de la DGSE, entre 2002 et 2003, a défini en ces termes le service action de la Direction générale de la sécurité extérieure: "Le service action est composé de gens qui, en clandestins, vont à l’étranger et font des missions pour le service de la France qu’on ne peut pas faire d’habitude."

Il désigne en fait ce département des renseignements français dont les membres dépêchés à l'étranger agissent "sous légende", c'est-à-dire vivent sous une fausse identité pour protéger les intérêts français et recueillir des éléments cruciaux pour les servir.

"Il y a un va-et-vient entre donner des informations aux unités mobiles ukrainiennes, notamment dans la zone de Kherson, et prendre du renseignement pour nous", a d'abord confirmé ce jeudi sur notre plateau l'éditorialiste de BFMTV pour les questions internationales, Patrick Sauce.

Mais si ce dernier a rendu hommage aux informations de son confrère Georges Malbrunot, il a toutefois nuancé: "Ce n’est pas forcément le service action qui est sur place pour ces missions de renseignement, parce que le service action, il fonctionne pour lui-même et s’il doit faire du renseignement, c’est d’abord en préparation de ses propres opérations: donc grosso modo pour aller tuer une de ses cibles."

Patrick Sauce a alors suggéré d'autres pistes:

"En revanche, dans ce qu’on appelle la Direction des opérations, vous avez plusieurs services dont le service assistance ou le service missions qui permettent de chercher très précisément du renseignement sur place pour quelque chose de beaucoup plus général ou alors aller aider les Ukrainiens."

Opacité

Cette relative incertitude s'explique par l'opacité inhérente à ce genre d'opérations. "C’est invérifiable, on pourrait appeler quinze fois le ministère des Armées ou l’Élysée qu’on me répondrait: 'il n’y a pas de présence française'", a achevé Patrick Sauce.

Une chose est sûre toutefois: Kiev et la ligne de front sont des nids d'espions. "On ne vit pas dans un monde de Bisounours! La France a évidemment du personnel sur place. Ça ne fait pas de la France un pays cobelligérant, mais ça a permis à la France d’apporter une aide aux Ukrainiens, comme les Britanniques l’ont fait, comme les Américains l’ont fait", a lâché Georges Malbrunot auprès de BFMTV mercredi soir, confirmant ce qu'il avait initialement écrit dans un post Twitter:

"Depuis le début de la guerre, Américains et Britanniques ont également déployé des hommes secrètement en Ukraine."

Le général Jérôme Pellistrandi, notre consultant Défense, a ajouté une dernière touche à ce panorama saturé d'agents, comme une ombre au tableau: "Il y a aussi beaucoup d’agents du GRU, un service de secret militaire russe, en Ukraine."

Article original publié sur BFMTV.com