Pourquoi la conférence sur la Palestine de Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan a été interdite par la préfecture ?

La conférence de Rima Hassan et Jean-Luc Mélenchon, prévue à l'université de Lille tout d'abord, avait d'abord été annulée par l'université avant d'être reprogrammée.

La conférence sur la Palestine à laquelle Jean-Luc Mélenchon devait participer à Lille a été interdite par la préfecture (Photo by JULIEN DE ROSA / AFP)
La conférence sur la Palestine à laquelle Jean-Luc Mélenchon devait participer à Lille a été interdite par la préfecture (Photo by JULIEN DE ROSA / AFP)

Nouveau rebondissement autour de la conférence prévue par Rima Hassan et Jean-Luc Mélenchon à Lille, en marge des élections européennes prévues le 9 juin prochain. Prévue dans un premier temps à l'université de Lille, avant d'être finalement annulée par la direction, estimant que "les conditions ne sont plus réunies pour garantir la sérénité des débats", elle avait été reprogrammée dans un lieu privé.

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Mais la préfecture du Nord a décidé à quelques heures de la conférence de prendre un arrêté interdisant cette conférence, consultable ici à partir de la page 5. Une décision qui suscite la colère de nombreux politiques, de gauche mais pas que. Emmanuel Macron a réagi, et souhaite que chacun "puisse exprimer sa voix" de Mélenchon à Zemmour. Le PS et Éric Zemmour ont également dénoncé ainsi l'interdiction de la conférence.

Football, Vigipirate, les force de l'ordre trop mobilisées, estime la préfecture

Pour justifier sa décision, la préfecture met plusieurs éléments en avant. Tout d'abord, la mobilisation des forces de l'ordre au même moment pour plusieurs raisons.

Le contexte national tout d'abord et le niveau "urgence attentat" qui mobilise de nombreux militaires. À cela s'ajoute le contexte local : la tenue du match de coupe d'Europe de football entre Lille et Aston Villa, classé à risque, qui doit débuter à 18h45, et enfin la commémoration du soulèvement du ghetto de Varsovie à la synagogue de Lille.

Une trop petite capacité d'accueil de la salle

À cela s'ajoutent les conditions dans lesquelles la conférence, reprogrammée dans cette salle, doit se tenir. La préfecture met en avant le fait que cette salle ne peut accueillir que 328 personnes maximum dont uniquement 261 dans la partie réunion et 67 dans la partie restauration.

Or, selon l'association "Libre Palestine" plus de 1 000 étudiants avaient prévu d’assister à l’évènement initialement prévu à l'université de Lille. "Le changement de lieu de cette conférence donnée uniquement aux personnes inscrites à la conférence interdite par l’université ne réduira pas la fréquentation de l’évènement compte tenu du nombre d’étudiants qui s’étaient inscrits pour assister à la conférence au sein de l’université", écrit la préfecture, constatant un problème de place par rapport au nombre de personnes invitées.

"Un risque d'attroupements" en raison de la forte affluence attendue

"Ce qui risque d’engendrer obligatoirement des attroupements devant l’établissement, avant et pendant la conférence, des troubles à l’ordre public sur la voie publique, ainsi que des risques sur la bonne tenue de la conférence, elle même en termes de sécurité aux personnes", poursuit la préfecture dans son arrêté.

À cela s'ajoute le fait que la salle est placée sous avis défavorable au regard de la réglementation des établissements relevant du public, ce qui n'interdit toutefois pas de recevoir du public.

Une "volonté de dissimulation envers les autorités publiques"

Enfin, la préfecture dénonce la communication du nouveau lieu par les organisateurs, voyant dans la communication qu'aux personnes inscrites au préalable "une volonté de dissimulation envers les autorités publiques".

A ces éléments matériels avancés par la préfecture du Nord s'ajoute le contexte qui entoure cette conférence. L'université de Lille a annulé la conférence, estimant que "les conditions ne sont plus réunies pour garantir la sérénité des débats". "On ne peut que regretter, dans ce contexte, la pression exercée sur l’autonomie pédagogique et scientifique des établissements d’enseignement supérieurs ", a-t-elle expliqué dans un communiqué.

Un contexte tendu

Car depuis plusieurs jours des élus de Renaissance, du Rassemblement national et des Républicains réclamaient son annulation. Parmi leurs motivations, le logo de l’association organisatrice Libre Palestine qui se trouvait sur l’affiche de la conférence, que vous pouvez voir en bas à droite sur l'affiche ci-dessous.

Sur celui-ci figure un territoire englobant Israël, la Cisjordanie et la bande de Gaza, sur lequel est apposé le nom de l’association, que certains voient comme la négation de l'État d'Israël, ce que l'organisation réfute.

Un arrêté illégal ?

Dans ce contexte, la préfecture mentionne l’appel à contremanifester de l'union nationale inter-universitaire (UNI) ou l'union des étudiants juifs de France (UEJf) faisant "craindre des rassemblements pouvant entrainer des heurts", et justifie donc l'interdiction de la conférence.

Un arrêté que Serge Slama, professeur de droit public, estime "illégal" et affirme qu'il sera suspendu, sous-entendant qu'un référé a pu être déposé auprès du tribunal administratif.

C’est la deuxième conférence à laquelle Jean-Luc Mélenchon doit participer qui est annulée en quelques jours. Le 10 avril à l’université Rennes-II, une conférence avait été annulé in extremis par l’établissement pour des raisons de "sécurité".