Publicité

Vaccin contre le variant Omicron: ce que disent les premières études

Ce nouveau variant du coronavirus était encore inconnu il y a deux semaines, mais il semble bien qu'Omicron échappe en partie à l'immunité produite par les vaccins.

SCIENCE - La recherche scientifique n’a certainement jamais été aussi rapide que depuis la pandémie de Covid-19. Il y a deux semaines, l’Afrique du Sud dévoilait au monde avoir découvert Omicron, un nouveau variant très préoccupant du coronavirus.

Les multiples mutations présentes sur la protéine Spike, qui permet au virus de pénétrer nos cellules, ainsi que la hausse des cas dans le pays, faisaient craindre que cette nouvelle souche soit plus contaminante et échappe en partie aux vaccins.

Ce mercredi 8 décembre, 14 jours plus tard, les résultats de trois études (très) préliminaires sur l’efficacité des vaccins face au variant Omicron ont été dévoilés. Elles vont toutes dans le même sens: une baisse de l’immunité encore jamais observée pour un variant du coronavirus.

Attention aux conclusions hâtives toutefois. Ces études, complexes, ne disent pas du tout que les vaccins n’ont aucune efficacité face à Omicron. Il est beaucoup trop tôt pour savoir avec certitude comment la vaccination protège de l’infection et encore plus des formes graves de Covid-19 dans la vie réelle. Ces études analysent, en laboratoire, une partie seulement de notre complexe système immunitaire.

Ces données, de même que la circulation réelle d’Omicron, laissent encore la place à de nombreux doutes. Mais elles confirment certaines craintes et donnent également quelques espoirs, notamment sur l’efficacité de la dose de rappel. Les résultats ne sont pas simples à lire, alors accrochez vous, Le HuffPost essaye de vous expliquer concrètement ce que ça veut dire et ce que l’on ne peut pas (encore) en déduire.

Une baisse nette pour les “simples” vaccinés face à Omicron

La première étude, publiée mardi 7 décembre dans la soirée, a été réalisée par une équipe de chercheurs sud-africains dirigée par le professeur à l’Africa Health Research Institute en Afrique du Sud, Alex Sigal. Pour faire simple, disons qu’après avoir cultivé le variant Omicron en laboratoire, ils l’ont mis en contact de cellules humaines et ont calculé à quel point le vaccin de Pfizer était efficace pour empêcher le virus de se répliquer.

Le résultat était attendu, mais ce n’est pas une bonne nouvelle: la neutralisation du virus est 40 fois moins importante sur Omicron que sur la souche qui circulait avant l’apparition des premiers variants. Il faut tout de suite apporter de la nuance. D’abord, ces tests en laboratoire ne veulent pas dire que le vaccin est 40 fois moins efficace en vie réelle. Le système immunitaire est bien plus complexe.

De plus, même lors de ces tests en laboratoire, il faut bien comprendre que le vaccin garde une certaine efficacité. Plus notre niveau d’immunité est élevé à la base, plus il y a de chance d’être protégé d’Omicron, malgré cette baisse.

D’ailleurs, les chercheurs ont, en parallèle, testé un autre dispositif: la neutralisation du virus dans le cas d’une personne vaccinée avec deux doses de Pfizer et ayant attrapé le Covid-19 par le passé (son système immunitaire a donc été activé trois fois). Il y a également une baisse avec Omicron, mais comme l’immunité est par défaut plus élevée, ils sont mieux protégés contre Omicron qu’avec simplement deux doses de Pfizer.

Le schéma ci-dessous l’explicite. Les points à gauche représentent l’efficacité des anticorps (la neutralisation) face à la souche originale. Ceux de droite face à Omicron. Plus le point est haut, plus le virus est contré. En orange, les participants avec uniquement deux doses de Pfizer, en vert, ceux qui ont en plus été infectés par le passé par le Covid-19.

La neutralisation du coronavirus provoquée par les vaccins diminue avec le variant Omicron, selon cette étude préliminaire (Photo: Sigal et al.)
La neutralisation du coronavirus provoquée par les vaccins diminue avec le variant Omicron, selon cette étude préliminaire (Photo: Sigal et al.)

Le rappel, efficace face à Omicron ?

Dans la foulée, les équipes de la virologue Sandra Ciesek ont également dévoilé un graphique représentant leur travail sur cette question. Ici, les scientifiques ont vérifié la neutralisation provoquée par différentes configurations de vaccins contre les variants Delta et Omicron.

La baisse de la neutralisation est variable, entre 10 et 37 fois moins pour Omicron que pour Delta. Ici aussi, ce qui est important, c’est qu’Omicron n’échappe pas entièrement aux anticorps développés par le vaccin. L’autre point essentiel, c’est qu’une dose de rappel (ou une infection en plus des deux doses) implique à chaque fois un plus haut niveau de neutralisation du virus.

Le schéma ci-dessous permet de s’en rendre compte. Les chercheurs ont testé plusieurs configurations. En haut à gauche, deux doses de Pfizer (BNT), deux doses avec un rappel (BNT/BNT) plus ou moins récent (15 jours ou 3 mois), et enfin, deux doses et une infection. À droite, même chose mais avec Moderna. En bas à gauche, même chose, mais avec AstraZeneca. En gris, Delta, en rouge, Omicron. Dans ce schéma, les petites croix noires montrent le niveau de neutralisation. Encore une fois, il faut que la croix soit le plus haut possible.

En fonction du vaccin, mais surtout du nombre de doses, l'efficacité varie face au variant Omicron (Photo: Ciesek et al.)
En fonction du vaccin, mais surtout du nombre de doses, l'efficacité varie face au variant Omicron (Photo: Ciesek et al.)

Enfin, une dernière étude a été mise en ligne dans la foulée. Elle est un peu plus encourageante, mais elle a utilisé des “pseudovirus”, de faux virus copiant les caractéristiques d’Omicron, et non le vrai variant cultivé en laboratoire. Les chercheurs ont détecté une baisse de la neutralisation par rapport à Delta, mais moins importante que dans les deux autres études (7 fois moins), ainsi qu’une variation très large entre les échantillons.

Des résultats convergents

Ces résultats, préliminaires encore une fois, ont été longuement commentés par les virologues et épidémiologistes du monde entier. Pour Christian Drosten, la convergence de ces trois études indépendantes est importante. “Tout cela n’est pas très bon pour les vaccinés doublement. Une troisième dose semble nécessaire”, note le virologue.

Le professeur Shane Crotty rappelle de son côté que des études similaires sur le variant Beta avaient montré que la neutralisation était divisée par 15 pour les doubles vaccinés, mais que la dose de rappel multipliait par 15 la neutralisation. En clair, les effets du variant Beta étaient absorbés par l’efficacité de la troisième dose.

Au vu de ces résultats, le virologue Florian Krammer suppose, sans certitude, que l’immunité des personnes simplement infectées ou n’ayant reçu que deux doses de vaccin va diminuer fortement, mais que l’efficacité chez les personnes ayant eu le rappel ou infectés et ayant eu deux doses devrait rester élevée.

Surtout, tous les chercheurs rappellent que ces données ont besoin d’être confirmées en vie réelle et qu’elles ne veulent pas dire que même si le vaccin protège moins contre l’infection, cela ne veut pas dire qu’il sera moins efficace pour empêcher les formes graves du variant Omicron. Il faudra d’autres analyses pour le savoir.

Pour autant, Floriant Krammer continue de penser qu’Omicron peut aggraver la pandémie actuelle, notamment à cause des non-vaccinés:

“Ceci étant dit, je continue de penser qu’Omicron est hautement problématique. S’il se propage largement - et tout porte à croire que ce sera le cas - nous assisterons probablement à une autre vague. Cette vague sera peut-être moins grave en termes de nombre de décès, car de nombreuses personnes auront une immunité partielle. Mais comme nous le voyons actuellement avec la vague Delta, même dans les populations relativement bien vaccinées, le virus trouve les personnes vulnérables (en raison de leur état de santé ou parce qu’elles ont choisi de ne pas être vaccinées) et fait de gros dégâts. Et actuellement, le taux de vaccination aux États-Unis est assez faible. Je pense que cette variante va prolonger la pandémie de manière significative. Nous devons prendre cela au sérieux. Et nous avons besoin de beaucoup plus de données pour mieux le comprendre.”

À voir également sur Le HuffPost: les mutations des virus expliquées en 2 minutes

Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

VIDÉO - Carnet de Santé - Dr Christian Recchia : "Je le crie avec force : la vaccination est une obligation"