Vie de mensonge - Isabelle : "Ma décision est incompréhensible pour la plupart. Il va penser que je suis une mère monstrueuse"

Isabelle, 32 ans, vit actuellement une relation avec un homme qu'elle aime mais à qui elle a caché un pan important de sa vie. La trentenaire a eu un enfant à 16 ans. Un garçon qu'elle a abandonné. Elle redoute la réaction de son conjoint et préfère se taire à jamais.

Vie de mensonge - Isabelle :
Vie de mensonge - Isabelle : "Ma décision est incompréhensible pour la plupart. Il va penser que je suis une mère monstrueuse"

Crédit : Getty

Isabelle a 32 ans et est en couple depuis 6 ans : "Quand je me suis mise en couple avec lui, ce n’était pas du tout prévu. Je pensais rester toute seule un moment. Je n’avais pas trop envie d’être avec quelqu’un à cause de mon histoire personnelle. Je venais de vivre un deuil, je venais de vivre une rupture, j’avais pris des décisions difficiles. Je ne me voyais pas m’engager à nouveau avec quelqu’un. Et puis il est arrivé et ça a été un grand bouleversement dans ma vie. Mais au moment de la rencontre, j’ai paniqué. Je ne lui ai pas tout dit sur moi. J’ai commis un gros mensonge pas omission que je regrette maintenant."

Isabelle ne dit pas à son nouveau compagnon qu’elle a eu un enfant alors qu’elle avait 16 ans : "Je ne dis pas que mon fils n’a pas de place dans ma vie mais j’ai décidé de ne pas demander la garde à l’époque et on se voit très peu. Il sait que j’existe et il peut me contacter quand il veut mais il a fait sa vie sans moi et le fait très peu aussi au final. On se voit pour son anniversaire, il m’envoie un message pour le mien. Je sais que je ne suis pas une mère pour lui. Il a son père et c’est déjà bien. Mes parents ne se sont pas spécialement impliqués non plus. Alors quand je me suis mise à parler de moi à mon compagnon, je n’ai pas pensé à ça. J’avais aussi peur qu’il me juge pour mon choix. C’est difficile à comprendre une mère qui décide de ne pas garder son enfant dans sa vie. J’avais peur qu’il me trouve froide ou qu’il ne décide de couper les ponts avec moi parce qu’il ne pourrait pas envisager de faire une famille avec moi. C’est quelque chose que j’envisage depuis plusieurs années et le fait d’avoir déjà eu un enfant ne change rien. Je ne suis pas la même personne."

Plus elle apprend à connaitre celui qui est devenu son compagnon et plus elle sait que lui dire la vérité est impossible : "C’est quelqu’un de chaleureux qui, si je l’avais rencontré plus tôt, aurait accepté d’élever mon enfant avec moi. Je pense même qu’il aurait senti que c’était sa place. Je ne peux pas lui dire ça. Il va penser que je suis une mère monstrueuse, qui est l’idée avec laquelle je me suis le plus débattue. C’est difficile de faire ce que j’ai fait pour que mon enfant soit plus heureux et de se dire qu’on a fait un geste de bonne mère. Dans le fond, je sais que j’ai eu raison. Mais la plupart du temps, je ne me fais pas d’illusion, c’est incompréhensible pour la plupart des gens et il m’arrive de les croire."

Isabelle redoute que son enfant lui demande de lui donner une place dans sa vie quand il sera majeur : "C’est quelque chose qui a toujours été envisagé avec son père. Il s’occupe de lui tant qu’il est enfant et, adulte, il fera son choix. On a aussi décidé que je ne serais jamais dépeinte comme une mauvaise mère, comme une femme qui l’a abandonné mais plutôt comme quelqu’un qui voulait le meilleur pour lui. Je fais confiance à son père pour ça. Je sais aussi qu’il ne dirait rien qui pourrait blesser gratuitement son enfant. Et qu’il sait que je ne vais pas débarquer n’importe quand pour demander des droits sur lui. C’est parce qu’il n’est pas menacé que j’ai toute sa confiance. Mais je pense que c’est naturel de savoir d’où l’on vient d’essayer de comprendre les décisions d’adulte quand on est soi-même devenu adulte. J’ai encore un peu de temps mais je suis prête à m’expliquer. Par contre, je ne sais pas quoi dire à mon compagnon. J’ai peur de devoir faire un choix entre les deux. Et autant j’aime mon enfant, autant j’aime celui qui partage ma vie depuis des années maintenant. Je ne sais pas quelle décision je pourrais prendre. Je joue la montre. Mais au fond de moi, je sais que je ne pourrais pas avoir les deux.".

Elle ne regrette pas d’avoir caché cette partie de sa vie : "J’ai le sentiment de ne rien devoir à personne, à part à mon enfant. Je ne me sentais pas capable d’en parler alors j’ai décidé de ne pas le faire. Ça a été mon choix et je l’assume. Est-ce que j’aurais voulu tout balancer et voir si ça allait le repousser ou pas ? Non, je ne pense pas. Je sentais au fond de moi que la vérité allait nous empêcher de vivre la belle histoire qu’on vit ensemble. Peut-être que la vérité va me péter au visage mais au moins j’aurais vécu ça. Je sais que j’ai menti et je suis prête à en payer le prix. Peut-être même qu’il va comprendre que j’ai eu peur de sa réaction et que j’avais un peu honte. Peut-être qu’il va accepter qu’il y a un enfant dans ma vie et que, dans quelques années, je voudrais vraiment lui faire une place, ON pourrait lui faire une place. On verra bien. Mais je ne regrette rien, ni mon fils, ni mon mensonge. À chaque fois j’ai fait ce qui me semblait être le plus juste."

Qui sont ces gens qui mentent sur leurs vies, leurs histoires ou leurs personnalités ? Comment en vient-on à mentir ? Pour certaines personnes, il n’est pas possible d’être totalement honnête même auprès de proches ou de personnes aimées. Essayons de comprendre un peu mieux ceux et celles qui mentent malgré l’amour.

Si vous aussi vous voulez raconter vos histoires exceptionnelles, vous pouvez envoyer un message à cette adresse : lucilebellan@gmail.com.

A lire aussi

>> TABOU - Ils portent des capteurs de glycémie pour surveiller leur poids : "Je ne vois pas pourquoi les diabétiques seraient les seuls à y avoir droit"

>> TABOU - Ces femmes hétérosexuelles préfèrent le porno lesbien : "Au moins, c'est consacré au plaisir des femmes"

>> TABOU - Ils se sont réconciliés avec leurs proches grâce à la maladie : "Je lui ai pardonné quand notre mère était dans le coma"